L’immortelle d’Italie est également appelée Cari, Fleur de Saint-Jean ou plus communément Hélichryse, de son nom latin Helichrysum italicum ssp. Italicum (Roth) G. Don.
L’iteipmai dans sa fiche technique de culture en 2013 en fait une description botanique précise : « plante vivace de 20 à 50 cm, sous-frutescente à la base, dressée ou ascendante, rameuse, tomenteuse ; feuilles linéaires très étroites, grêles et allongées, atteignant 2 à 3 cm, roulées en-dessous par les bords, tomenteuses, verdâtres ou vertes sur les deux faces ; involucre petit (2 à 3 mm de diamètre), franchement oblong-cylindrique, à folioles dressées-appliquées, les extérieures ovales, les suivantes oblongues très obtuses, les intérieures linéaires, chargées de glandes sur le dos ; akènes très petits, couverts de petites glandes blanches, brillantes ; capitules serrés en corymbes, d’un jaune pâle » [1]. Sa floraison a lieu entre juin et juillet.
Le genre Helichrysum comprend plusieurs centaines d’espèces différentes, et l’espèce italicum comprend quant à elle six sous-espèces réparties sur le pourtour méditerranéen [2] :
- italicum
- microphyllum
- serotinum
- pseudolitoreum
- siculum
- picardii
C’est la sous-espèce italicum qui est principalement présente en France, et qui est recherchée pour ses propriétés. De par son caractère héliophile[1] et xérophile[2], on retrouve l’immortelle d’Italie en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Corse. C’est une plante qui peut craindre le gel, et qui n’aime surtout pas les stagnations d’eau dans le sol ni les teneurs trop élevées en calcaire actif [3].
Endémique du pourtour méditerranéen, l’hélichryse prend la forme d’un petit buisson de 40 à 60 cm de haut et a une très belle floraison jaune qui dure tout l’été.
Le terme « Helichrysum » vient d’ailleurs du grec « helios » qui signifie soleil, et « chrysos » signifiant or, d’où son autre appellation d’or solaire. En France, l’appellation « immortelle » vient de la conservation exceptionnellement longue de ses bouquets secs. On raconte que les Grecs vénéraient déjà cette plante à l’époque greco-romaine car selon eux, elle symbolisait l’amour. Selon l’Odyssée d’Homère, le héros de la mythologie grecque Ulysse rencontra une femme du nom de Nausicaa lors d’un naufrage. Elle était aussi belle qu’une déesse, et sa beauté ne tenait qu’à un secret : l’utilisation de l’huile d’immortelle. Il est aussi dit qu’Apollon avait l’habitude de rendre ses oracles à Delphes en arborant une tiare d’hélichryse pour rappeler au monde son immortalité [2].
Ce n’est donc pas étonnant que l’huile essentielle (HE) tirée de cette plante au nom évocateur soit aujourd’hui utilisée dans des produits cosmétiques anti-âge. Ces propriétés ont d’ailleurs ensuite été prouvées scientifiquement par la marque L’Occitane en Provence, qui a développé, il y a plus de dix ans, une gamme de cosmétiques intégrant des extraits d’immortelle, et mis en place des cultures en Corse pour intégrer son approvisionnement [4]. L’huile essentielle d’immortelle possède également des anti-inflammatoire, circulatoire et cicatrisante [3]. En plus de ses nombreuses propriétés, cette huile essentielle présente l’avantage de pouvoir être appliquée directement sur la peau sans avoir besoin d’être mélangée à une huile végétale [3], contrairement à la plupart des huiles essentielles, ce qui explique sa place dans la « trousse de base » en aromathérapie familiale.L’odeur caractéristique de curry de cette plante, qui se nomme d’ailleurs « Curry plant » en anglais, lui confère une utilisation comme aromate. Elle est aussi recherchée en parfumerie, pour son parfum pénétrant, doux, fleuri, fruité. Elle peut être utilisée comme fixateur ou comme nuanceur dans les parfums [1].
Les principes actifs contenus dans la plante sont les suivants [2] :
– Sesquiterpènes : β-caryophyllène
– Monoterpénols : nérol
– Esters terp. : acétate de néryle, butyrate de néryle
– Cétones : β-diones : italidiones I, II et III.
Il n’existe pas de norme AFNOR pour l’huile essentielle d’Hélichryse, mais d’après l’iteipmai [1], la qualité de l’huile essentielle se trouve dans les références suivantes :
– acétate de néryle : 30 à 40 %
– γ-curcumène : 4 à 13 %
– Propionate de néryle : 3 à 6 %
– Limonène : 2 à 7 %
– 4, 6, 9-triméthylde-8-én-3,5 dione : 5 à 9 %
– Nérol : 2 à 3 %
– Italicène
Pour être reconnue de bonne qualité, l’HE doit contenir au moins 30% d’acétate de néryle, et moins de 9 % de β-dicétones [3]. Il a été montré par les travaux de Bianchini et coll., que la variabilité de la composition d’huile essentielle est due en partie aux paramètres physico-chimiques des sols (texture et acidité) et en partie au stade de la plante [6]. On privilégiera le stade pleine floraison pour obtenir une qualité optimale [1]. En effet, c’est à ce moment-là que la concentration en acétate de néryle et propionate de néryle est la plus élevée. Par ailleurs, il a été constaté que la teneur en acétate de néryle était toujours supérieure à 30% sur des immortelles provenant de Corse, contrairement à une huile essentielle provenant des Balkans [4].
On distille toute la sommité fleurie directement après la récolte car l’huile est contenue dans les fleurs épanouies mais également dans le feuillage. La technique de distillation à la vapeur, qui peut durer entre 1h30 et 4h30, permet d’obtenir environ 2kg d’huile essentielle à partir d’1 tonne de végétal [3]. L’huile est de couleur jaune clair à vert olive, d’une odeur légère et délicate ou parfois plus capiteuse.
La production d’huile essentielle, estimée à 4.5t en 2013, est majoritairement issue des Balkans, de France et de Sardaigne [5]. La production peut être issue de culture ou de cueillette sauvage. En Corse, on estime que 35% de la production provient de la cueillette [3]. Cette plante recherchée est d’ailleurs protégée en région PACA, et sa cueillette sauvage est règlementée en Corse. La cueillette est également pratiquée en Croatie, dont la production totale d’huile essentielle est estimée à 3 tonnes par an [3]. Nous n’avons pas d’informations précises sur les surfaces cultivées en France. Elles sont estimées à 200ha environ en Corse, et se seraient développées ces dernières années dans le Sud Est du territoire sur une surface d’environ 100ha [3].
Jusqu’en 2005 la production d’huile essentielle, principalement issue de la cueillette (issue de Corse et des Balkans), était assez stable et permettait de répondre à la demande. Mais depuis ces 15 dernières années, l’essor de l’aromathérapie et la popularisation de cette huile pour ses propriétés cosmétiques ont accru considérablement la demande, entrainant le développement des cultures pour cette plante en alternative à la cueillette sauvage. Le prix de vente de l’huile essentielle a beaucoup augmenté ces dernières années jusqu’à atteindre en 2016 un prix de l’ordre de 1300 à 2000€/kg, soit presque un prix doublé par rapport à 2005 [3]. Ce prix varie en fonction de la qualité de l’huile et du type de culture des plants : conventionnel ou biologique.
Le Conservatoire et ses travaux sur l’immortelle
Le Conservatoire a entrepris dès 2003 des prospections de populations d’Helichysum italicum ssp. italicum sur le territoire corse. Ce travail a fait suite à des premières prospections sur plusieurs sous-espèces du genre (italicum, serotinum, et picardii) en Coatie, Italie et en Corse [6].
L’évaluation des vingt populations corses a permis de sélectionner des individus intéressants tant au niveau de la qualité de leur huile essentielle qu’en terme de caractéristiques agronomiques, notamment sur la résistance au froid. En regroupant ces clones et en les croisant entre eux, le Conservatoire a pu mettre au point les variétés ‘Hélimilly’ et ‘Hélimilly 2’ en 2015, et ‘Hélimilly 3’ en 2017.
Afin de répondre à la demande croissante des producteurs pour obtenir du matériel végétal de qualité et trouver une solution aux problèmes de germination rencontrés sur cette espèce, différents travaux concernant l’itinéraire de culture ont été menés par le CNPMAI entre 2016 et 2018. Différents environnements ont été testés et les résultats hétérogènes n’ont pas vraiment permis de conclure sur le meilleur itinéraire adapté. Néanmoins, les semences récoltées durant ces 3 années d’essai ont permis de répondre à la demande des professionnels de la filière : 800 grammes de semences ont été vendus entre 2018 et 2020, avec des taux de germination compris entre 40 et 95%, ce qui correspond à plus de 12 millions de graines.
Cette année, une nouvelle parcelle d’immortelle d’Italie a été implantée en pleine terre au Conservatoire dans le but de conserver les clones parents d’’Hélimilly 3’ mais également de produire de la semence. Les hivers étant de plus en plus doux à Milly-la-Forêt, il y a moins de risques que les pieds souffrent du gel, et un environnement en extérieur favorisera la pollinisation des plants et l’intervention d’auxiliaires naturels. La plantation initialement prévue au printemps à partir de jeunes plants bouturés a finalement été décalée à l’automne 2020. Les plants pourront ainsi bénéficier des dernières températures clémentes pour s’implanter sans pour autant souffrir de sécheresse. La planche a été butée manuellement sur 2 rangs afin de surélever les pieds et éviter les stagnations d’eau fréquentes sur le terrain en hiver et qui pourraient menacer la culture. De plus, et pour la première fois au Conservatoire, la plantation a été faite« en planche permanente ». Ce concept agricole a pour but d’améliorer la vie du sol en limitant le travail et le tassement de celui-ci en plantant toujours sur la même planche de culture, et en favorisant les rotations de culture avec apport de matière organique via du paillage afin de créer un cercle vertueux à l’échelle de la planche, puis à plus long terme à l’échelle de la parcelle. La planche choisie pour cette culture avait été plantée avec des espèces bisannuelles en 2018 sur une bâche plastique qui n’avait pas été retirée à la fin de la culture. Nous avons donc uniquement enlevé la bâche et effectué un désherbage léger, la bâche ayant empêché la pousse des adventices, puis réalisé nos buttes et planté les plants. Cette méthode permet de ne pas modifier la structure du sol établie pendant la précédente culture et préserve donc tous les organismes et micro-organismes du sol qui vont pouvoir bénéficier à la nouvelle culture.
Bibliographie
| [1] | iteipmai, «Fiche technique Immortelle d’Italie,» 2013. |
| [2] | FranceAgriMer, «Conseil spécialisé PPAM – Séance du 2 mars 2017 – Focus Immortelle,» 2017. |
| [3] | M. Combalot, L’Immortelle d’Italie (Helichrysum italicum) et son huile essentielle., Pharmaceutical sciences, 2013. |
| [4] | «Site internet de L’Occitane,» [En ligne]. [Accès le 6 novembre 2020]. |
| [5] | P. Franchomme, L’aromathérapie exactement, 2001. |
| [6] | A. Bianchini et coll., Partitioning the relative contributions of inorganic plant composition and soil characteristics to the quality of Helichrysum italicum subsp. italicum (Roth) G. Don fil. essential oil., Chem. Biodivers., 2009. |
| [7] | Réseau PPAM, «Compte-rendu d’activités 2013,» 2014. |
| [8] | CNPMAI, «Compte-rendu d’activités techniques 2003,» 2004. |
[1] qui a besoin d’une luminosité importante
[2] qui affectionne les sols secs